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Un bailleur HLM condamné pour fichage ethnique

Vendredi, 2 Mai, 2014
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Un des plus gros bailleurs sociaux d'Ile-de-France, Logirep, a été condamné vendredi 2 mai à 20 000 euros d'amende par le tribunal correctionnel de Nanterre pour avoir établi un « fichage ethnique » de ses locataires.

La société d'habitations à loyer modéré a en revanche été partiellement relaxée des faits de discrimination raciale pour lesquels elle était poursuivie. Le tribunal a considéré que Logirep n'était pas responsable du refus d'attribution du logement.

Le tribunal a en outre condamné le bailleur social à verser 10 000 euros de dommages et intérêts aux deux associations parties civiles dans cette affaire, SOS Racisme et La Maison des potes.

Lire l'interview du géographe Christophe Guilluy (édition abonnés) : « Les bailleurs sociaux font du panachage ethnique sans le dire »

« ASSEZ DE NOIRS DANS LA TOUR »

Ce procès rare sur le sujet tabou de la gestion ethnique des logements sociaux faisait suite à une plainte, en 2005, de l'un de ses locataires, Frédéric Tieboyou. Cet homme d'origine ivoirienne vivait à l'époque avec sa mère dans un appartement du 20e arrondissement de Paris, qu'il considérait comme insalubre. Après une demande de changement de logement, son dossier avait été examiné en commission d'attribution. Cette dernière a notifié par courrier à M. Tieboyou le refus de son dossier, indiquant pour motif « mixité sociale ».

Furieux de cette décision, M. Tieboyou avait décidé d'appeler la conseillère de Logirep qui suit son dossier. C'est alors que celle-ci lui aurait expliqué que le logement lui avait été refusé parce qu'« il .était d'origine africaine et qu'il y avait déjà assez de Noirs dans la tour ». Cette conversation, enregistrée par le plaignant, constituait le principal élément à charge contre Logirep

L'enquête ouverte en octobre 2005 avait montré que la société anonyme d'HLM conservait des données sur ses locataires faisant apparaître, pour certains d'entre eux, leurs origines raciales ou ethniques — par exemple « Nationalité : F (orig. Alg.) » ou « Gy » pour Guyane. Le représentant de Logirep avait expliqué à l'audience qu'il s'agissait d'un champ destiné à l'informaticien qui ne servait pas aux gestionnaires du parc locatif. Le tribunal correctionnel, estimant qu'un telle pratique était contraire à la loi, a condamné Logirep.

S'agissant de la demande d'HLM de M. Tieboyou, il est apparu qu'elle avait été écartée notamment parce que celui-ci avait menti sur l'état de son logement parisien et parce que sa mère causait des troubles de voisinage. Pour autant, les juges ont considéré que le dossier avait fait l'objet d'une analyse discriminatoire, comme l'indiquent les propos tenus au téléphone par la salariée de Logirep et par l'utilisation de la notion floue de « mixité sociale ». Mais le tribunal a conclu que le bailleur ne pouvait pas être crédité de la décision de rejet prononcée par la commission d'attribution, d'où la décision de relaxe partielle pour « défaut d'imputabilité ».

« C'EST UNE AVANCÉE »

«C’est absurde, réagit Samuel Thomas, président de la Fédération nationale des Maisons des potes. Nous allons faire appel sur cet aspect de la décision qui revient à exonérer Logirep de sa responsabilité. Une commission d’attribution n’est pas distincte de son bailleur. » A l'inverse, M. Thomas se félicite que Logirep ait été sanctionné pour avoir collecté des informations sur les origines des locataires : « C'est une avancée même si l'amende est dérisoire. »

De son côté, la société d’HLM assure n’avoir saisi que des données qu’elle était en droit de recueillir et se réserve la possibilité de faire appel de sa condamnation pour fichage ethnique.

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