Aller au contenu principal

egal.fr

 banniére

Discrimination au logement : une société relaxée

Mercredi, 13 Septembre, 2006
Logo

Situation rare en matière de discrimination raciste au logement ; cette fois-ci, le délit semblait parfaitement caractérisé. En mars 2003, Michel Froidure a pris rendez-vous au téléphone pour visiter un appartement qu’il désirait louer à Montpellier. «Je suis arrivé à ce rendez-vous avec, en main, deux bulletins de salaires et l’avis d’imposition 2001 d’un ami qui se portait caution, documents qui prouvaient que mon ami disposait d’un revenu nettement supérieur à trois fois le loyer», explique-t-il. Avec un tel dossier, le jeune homme était en droit d’espérer obtenir le logement convoité.

 

 

Société

 

Discrimination au logement : une société relaxée

Par Pierre DAUM

QUOTIDIEN : Mercredi 13 septembre 2006 - 06:00

Situation rare en matière de discrimination raciste au logement ; cette fois-ci, le délit semblait parfaitement caractérisé. En mars 2003, Michel Froidure a pris rendez-vous au téléphone pour visiter un appartement qu’il désirait louer à Montpellier. «Je suis arrivé à ce rendez-vous avec, en main, deux bulletins de salaires et l’avis d’imposition 2001 d’un ami qui se portait caution, documents qui prouvaient que mon ami disposait d’un revenu nettement supérieur à trois fois le loyer», explique-t-il. Avec un tel dossier, le jeune homme était en droit d’espérer obtenir le logement convoité.

 

Sauf que… Michel Froidure est métis (ce que ni son nom ni son accent parisien ne peuvent laisser soupçonner au téléphone), et son cautionnaire, qui vit et travaille en France depuis quinze ans, est de nationalité algérienne. Quinze jours plus tard, au lieu de signifier simplement son refus de louer par téléphone, la secrétaire de l’agence immobilière, Mme P., commet la «faute» d’envoyer une lettre à Michel Froidure, dans laquelle elle justifie sa décision par la seule raison que «le cautionnaire doit être de nationalité française». Ce que le code pénal (art. 225-1 et 225-2) considère comme un délit de «discrimination à raison de la race ou de l’origine dans l’offre ou la fourniture d’un bien ou d’un service».

Hier, devant le tribunal correctionnel de Montpellier, le patron de la secrétaire fautive a expliqué qu’«il s’agit d’une maladresse dans la rédaction de cette lettre», que son employée avait en fait refusé «parce que M. Froidure n’avait apporté aucun justificatif de revenus de son cautionnaire, ni de preuve de domiciliation bancaire en France». Avant de préciser: «Je ne suis pas raciste, puisque que je suis marié avec une Libanaise.» Détail étrange: dans le hall du tribunal, Mme P. contredisait les propos de son patron, et expliquait à Libération que «M. Froidure s’est présenté avec deux feuilles de salaires, et l’avis d’imposition 2001 du cautionnaire», mais que «les revenus étaient insuffisants».

Sur ces documents, qui figurent dans le dossier remis au juge, on comprend pourtant que le cautionnaire disposait à l’époque d’un revenu total de 2600 euros par mois (soit six fois le futur loyer de M. Froidure), répartis entre un salaire net de 1300 euros, et un revenu foncier de la même somme. On comprend aussi que ces revenus sont versés dans une banque française.

Après une demi-heure de délibération, la présidente du tribunal de Montpellier a entièrement relaxé le patron de l’agence immobilière – seul poursuivi car pénalement responsable. Sans s'être encore prononcée sur les raisons de cette relaxe, elle s’est cependant opposé à l’avis du procureur qui, constatant que «la loi n’avait pas été respectée», avait réclamé une amende. «Le tribunal de Montpellier vient d’envoyer un message terrifiant à la jeunesse issue de l’immigration, et notamment à celle qui avait exprimé sa rage lors des émeutes de novembre dernier», a déploré Samuel Thomas, vice-président de SOS Racisme, qui s’était porté partie civile. «Il leur dit: si vous êtes victimes de racisme, ne comptez pas sur la justice pour défendre vos droits!»



http://www.liberation.fr/actualite/societe/204059.FR.php

© Libération

 

 

 

 

 

 

Publier un nouveau commentaire

Le contenu de ce champ sera maintenu privé et ne sera pas affiché publiquement.