

Fatima Besnaci-Lancou, présidente de l’association Harkis et Droits de l’homme.
Affaire Frêche: «Ce procès pourrait en partie réparer les années d’humiliation»
Par Pierre DAUM
LIBERATION.FR : vendredi 1 décembre 2006
Montpellier, de notre correspondant
Fatima Besnaci-Lancou est présidente de l’association «Harkis et Droits de l’homme». Egalement auteur du livre Fille de harki (2005), elle se réjouie de la médiatisation de cette affaire.
Êtes-vous
satisfaite de ce procès?
Le seul fait que ce procès ait eu lieu, accompagné d’une forte médiatisation,
constitue en soi une véritable avancée dans la reconnaissance de l’histoire
douloureuse des Harkis. Des paroles très belles ont été prononcées hier, qui
pourraient en partie réparer les années d’humiliation que nous avons subies en
France. L’ensemble des associations harkies s’est retrouvé, oubliant les
querelles. Mais surtout, pour la première fois de notre histoire, des
organisations comme le Mrap, SOS racisme ou la LDH sont venues nous soutenir. J’ai le sentiment
que les gens de gauche comme de droite sont en train de prendre conscience de
toutes les injustices qui ont été faites à cette communauté de destin
particulière que sont les Harkis. En 1962, Pierre Vidal-Naquet écrivait déjà
que «les Harkis n’ont
pas à payer pour nos fautes».
Le procureur a réclamé 15000 euros
d’amende…
J’ai beaucoup apprécié la démonstration juridique du procureur. Deux questions
essentielles se posaient: les propos injurieux (sous-hommes) ont-ils une
connotation raciste? Et la communauté harkie est-elle visée dans son ensemble?
Aux deux questions, le procureur a répondu «oui»!
Alors que la défense, elle, a tenté de montrer que Georges Frêche n’avait
agressé que deux ou trois individus, et qu’en faisant cela, il avait même
défendu l’honneur des Harkis! Je croyais rêver… Quant aux 15000 euros, c’est
vrai que cela ne me plaît pas du tout. C’est comme si la douleur terrible que
nous avons tous ressentie avec ces insultes de sous-hommes avait un prix. Je
préfèrerais mille fois une condamnation à 1 euro symbolique. Agrémentée
peut-être de trois mois de travaux d’intérêt général à construire des logements
décents pour les familles de Harkis de Montpellier (rires). Et en tout cas,
d’une peine d’inéligibilité.
Certains enfants de Harkis ont
exprimé une vive colère à la sortie de l’audience.
Je pense que des manifestations bruyantes dans l’enceinte d’un tribunal sont
contre-productives. D’autant plus que j’ai confiance dans la justice telle que
je l’ai vécue hier. Le jugement est attendu pour le 25 janvier. Et les juges
ont le droit d’aller au-delà de la peine requise par le procureur.
Publier un nouveau commentaire