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Discrimination raciale ?

Vendredi, 27 Juin, 2003
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Le tribunal de Montbéliard avait condamné les deux responsables de société. Elles ont fait appel. L'affaire est en délibéré.

Discrimination raciale ?

 

BESANÇON. _ « J'ai une Ukrainienne au pair pour garder ma fille, vous croyez que si j'étais raciste je confierais mon enfant à une étrangère ? » Argument suprême pour la plus jeune des prévenues qui était également directrice de l'entreprise Biophase de Peseux incriminée. Sa soeur était gérante de cette EURL et de la société suisse qui fournissait les produits cosmétiques qu'elle commercialisait.

L'entreprise fonctionnait avec des téléphonistes qui prenaient les rendez-vous clientèles et des conseillères vendeuses chargées d'aller à domicile prodiguer des soins et vendre des produits de parfumerie et des cosmétiques.

Huit anciennes employées, relayées par SOS racisme, accusent les responsables de Biophase, aujourd'hui en faillite, d'avoir sélectionné ses employées en éliminant les étrangères et plus spécialement les Maghrébines. « Je devais jeter à la poubelle les curriculum vitae qui portaient un nom arabe », explique l'une des standardistes. Même méthode avec les fiches des clientes. On aurait expliqué aux personnes chargées de cette sélection que c'était pour éliminer « les mauvaises payeuses ».

Sanctions sévères

Le 7 février dernier, le tribunal de Montbéliard condamnait la directrice à six mois d'emprisonnement avec sursis et 1500 € d'amende et la gérante à 6 mois avec sursis et 5000 € d'amende. SOS racisme, partie civile représentée par le vice-président de l'association, Samuel Thomas, et par son avocat Me Bergelin, obtenait 1.500 € de dommages et intérêts et 600 € pour les frais de procédure.

Hier, comme elles l'avaient déjà fait en première instance, les deux femmes ont parlé de coup monté par une employée licenciée et par ses amies. « Je nie et je le prouve », lançait l'ancienne directrice, soulignant qu'elle avait obtenu 31 attestations allant dans le sens contraire. Une seule concession à l'accusation : elle savait que des conseillères refusaient de se rendre dans certains quartiers parce qu'elles avaient peur.

Elle est relativement coincée entre les accusations des anciennes employées et sa soeur qui, après avoir répondu aux gendarmes qu'elle n'était pas concernée par cette affaire, a laissé, hier, son avocate, Me Giacomoni, conclure : « Elle n'a pas eu, en ce qui la concerne, connaissance de faits discriminatoires ».

Statistiques

Avec son confrère, Me Letondel, qui défend sa soeur, l'avocate apporte des listes de vendeuses démontrant que des noms étrangers y figurent (17 %), même des noms à consonance nord-africaine (3,6 %).

Ce qui n'empêchera pas Me Bergelin de s'insurger contre ces prévenues qui géraient leur affaire en famille (même si les employées l'ignoraient), à leur façon, au niveau financier - la gérante a été condamnée pour banqueroute avec 1 million d'euros de passif - mais aussi en écartant les gens qu'elles ne voulaient pas y voir.

L'avocat général Daniel Depoulon se montre encore plus sévère avec les deux soeurs : « La personne qui a dénoncé leurs agissements n'a pas agi de la sorte parce qu'elle était licenciée. C'est parce qu'elle s'opposait à ces pratiques, qu'elle avait pris contact avec SOS Racisme, qu'on l'a mise à la porte en l'accusant du vol d'une disquette informatique... Des faits indignes, révoltants, stupides, des pratiques terriblement humiliantes, un manque de respect pour la dignité, des agissements dangereux pour la paix sociale... » D'où ses réquisitions de confirmation. Délibéré le 4 septembre prochain.

Annette VIAL

© L'Est Républicain  - 27/06/2003

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