Jura : polémique sur l'immigration

Jura : polémique sur l'immigration

Candidat aux Européennes sur la liste de Villiers, le maire de Saint-Claude ne « gère » plus l'afflux de populations turques ; le dit crûment, et déclenche une plainte de SOS Racisme.

BESANÇON. _ La première controverse liée aux Européennes en Franche-Comté vient de s'ouvrir dans le Jura, où SOS Racisme a déposé le 30 mars une plainte pour incitation publique à la haine raciale visant le maire de Saint-Claude Jean-Louis Millet.

Elle s'appuie sur la divulgation d'un courrier adressé le 1er octobre dernier à Nicolas Sarkozy avec copies au préfet et sous-préfet du Jura. M. Millet y posait en termes abrupts la question de l'intégration des populations immigrées, et des moyens de subsistance de certains membres de la communauté turque de Saint-Claude, sur fond de chômage et d'augmentation de la délinquance.

L'argumentation s'est retrouvée mystérieusement sur deux sites islamophobes d'internet, cette publication faisant l'objet d'une deuxième plainte de SOS Racisme datée du 16 avril. Jean-Louis Millet qui dément formellement avoir utilisé internet, a de son côté déposé une plainte pour violation du secret de la correspondance.

Le maire de Saint-Claude, élu du Mouvement pour la France confirme qu'il sera candidat aux Européennes sur la liste de Philippe de Villiers dont le thème de campagne est le « non » à l'entrée de la Turquie dans l'Europe.

Risque d'explosion sociale

Pour SOS Racisme, il ne fait aucun doute que Jean-Louis Millet a « laissé filer » volontairement son argumentaire sur internet, et « démontre clairement sa volonté de soutenir des mobilisations racistes et islamophobes » précise Samuel Thomas vice-président de SOS Racisme dans la lettre qu'il a adressée au procureur de la République. Pour le responsable de SOS Racisme, le maire « dépositaire du pouvoir de police municipale et garant de l'ordre public... a choisi délibérément d'attiser la haine raciste et islamophobe de certains de ses concitoyens contre les personnes originaires de Turquie ou de confession musulmane ».

Le maire de Saint-Claude qui est allé le 26 mars s'expliquer devant la communauté turque réfute ces allégations, y voit « un règlement de compte politique » et assume. « J'ai voulu alerter le ministre comme la loi l'impose aux maires responsables de la sécurité dans leurs commu nes. Ma ville ne peut plus accepter davantage de populations étrangères sans risquer une explosion sociale à court terme » dit-il.

A Saint-Claude, 12.000 habitants, la population turque représente 2.000 personnes. Un « seuil critique » pour Jean-Louis Millet qui alertait Sarkozy sur la rapidité de développement des regroupements familiaux, et s'interrogeait aussi sur la provenance des fonds « en liquide » investis dans l'immobilier ou « l'achat de véhicules de grosse cylindrée ».

« Je n'ai fait que constater des faits et poser tout haut les questions que beaucoup se posent alors que le chômage sévit, et que la délinquance et les trafics augmentent. Je regrette la généralisation de mes propos à l'ensemble de la communauté turque, mais je continuerai à relever les anomalies et à appeler au respect des règles de vie sociale en France » affirme Jean-Louis Millet.

Le procureur de la République a enregistré les plaintes de SOS Racisme. Le préfet Aïssa Dermouche ne se prononce pas sur le fond mais souhaite qu'une discussion s'instaure à Saint-Claude « dans le respect des uns et des autres ». Une occasion pour évoquer les réussites et les ratés de l'intégration.

Monique MERLO