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Immobilier : à Palaiseau, la plainte antidiscrimination aboutit 10 ans après

Mardi, 2 Février, 2016
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Après près de 10 ans de non-lieu et d’appels successifs, la plainte déposée le 21 février 2006 par l’association SOS Racisme pour discrimination contre le directeur d’une agence immobilière de Palaiseau devrait enfin aboutir à un procès. Dans une notification d’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 1er février que nous nous sommes procurée, le parquet ordonne « un supplément d’information aux fins de mise en examen » du gérant et de l’un de ses collaborateurs. « Il faut être tenace », réagit Samuel Thomas, vice-président de la Maison des potes - Maison de l’égalité, qui a pris la suite de SOS racisme dans ce dossier.

Cette affaire avait été révélée au grand jour à la suite de l’enregistrement d’une caméra cachée par une employée de l’agence choquée par les méthodes de son patron (voir ci-dessous). « C’est rare d’avoir des gens de l’immobilier qui se manifestent. Cela demande du courage », constate Samuel Thomas qui ignore ce que cette femme est devenue. « Son CDD dans l’agence n’a pas été reconduit à l’époque », se souvient le militant associatif.

« S’il n’y a pas de sanction, il ne peut y avoir d’amélioration »

Parmi les victimes qui ont témoigné, une femme « européenne à la peau blanche » se prépare, en janvier 2006, à signer le bail de location d’une maison située à Villebon-sur-Yvette quand son mari, un ingénieur de nationalité franco-béninoise, se présente au rendez-vous. Cinq minutes plus tard, l’agent immobilier présent leur annonce subitement que le locataire actuel ne souhaite plus partir. « Je suis sûr que les victimes ont oublié cette affaire. Souvent, elles décrochent. Les associations comme la nôtre sont là pour se substituer à elles, avance Samuel Thomas. C’est important. Car s’il n’y a pas de sanction, il ne peut y avoir d’amélioration. »

Contactée, l’agence n’a pas souhaité répondre à nos questions. Dans la notification d’arrêt, il est écrit que le gérant mis en cause, qui n’est aujourd’hui plus à la tête de l’entreprise, « conteste les faits » et estime s’être fait « piéger » par son employée. Pour sa défense, il argue notamment être par ailleurs propriétaire d’une société civile immobilière qui loue à des personnes d’origine « guadeloupéenne, martiniquaise, comorienne ou algérienne ».

Une caméra cachée avait révélé l’affaire 

L’enregistrement réalisé en caméra cachée par l’employée d’une agence immobilière de Palaiseau, interrogeant son patron sur la politique à adopter à l’égard des étrangers, avait été diffusé le 24 février 2006 dans l’émission « Pièces à conviction » sur France 3. Selon la cour d’appel de Paris, « ces propos viennent étayer le fait que le refus discriminatoire a pu être opposé à certains candidats pour complaire à certains propriétaires ». En voici un extrait :

L’employée : « Moi je suis embêtée parce que, imaginez-vous, ils me posent des questions précises et comme vous avez dit : Pas de noirs, pas de jaunes, pas d’Arabes, quand ils ont un bon dossier, qu’est-ce que je dis ? »

Le gérant : « Vous me les donnez et puis faut faire un dossier. »

L’employée : « Oui mais l’autre jour il y en a un qui m’a demandé qui était l’assurance parce que moi j’ai dit : On transmet le dossier à l’assurance. »

Le gérant : « Vous me les envoyez, vous me les envoyez. C’est ce que je vous avais dit. Si vous êtes embêtée, faut me les envoyer. »

L’employée : « Ce monsieur qui travaillait au Muséum, c’est quand même pas un imbécile. Il m’a dit : Attendez je ne comprends pas… […] Mais de toute façon, c’est rédhibitoire, c’est pas de noirs, pas de jaunes, pas d’Arabes… »

Le gérant : « Cela nous arrive quelques fois, ça dépend quel propriétaire, cela dépend. Je pense que là je vais pouvoir jouer avec l’assurance. »

 

    

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