INJURE
15.000 euros d'amende requis contre Frêche
Le président du Languedoc-Roussillon est jugé pour avoir traité les harkis de "sous-hommes". Verdict le 25 janvier.
Le procureur a requis jeudi 30 novembre une amende de 15.000 euros contre le président socialiste de la région Languedoc-Roussillon Georges Frêche, qui est jugé par le tribunal correctionnel de Montpellier pour avoir traité les harkis de "sous-hommes".
L'affaire a été mise en délibéré au 25 janvier 2007.
Peu avant minuit, jeudi, le procureur, Olivier Decout, a qualifié les propos de
Georges Frêche d'"injures scandaleuses qui doivent être
sanctionnées". Il a demandé une amende et la publication de la
condamnation dans la presse. Il n'a pas requis de peine de prison, ce que la
loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse et de l'expression
lui permettait. Cette loi prévoit jusqu'à 22.500 euros d'amende et six mois,
voire un an d'emprisonnement, pour "injure aggravée".
Déception
Me Alain Scheuer, l'avocat du président de l'association Ajir-34
(Association justice, information, réparation pour les harkis), Abelkader
Chebaiki, qui était le principal visé par les propos de Georges Frêche, a
qualifié les réquisitions de "modérées".
Les réquisitions ont été accueillies avec "colère" et
"déception" par les représentants de plusieurs associations de
harkis. "Ce sont les valeurs de la république qui ont été bafouées sans
que le procureur ne réclame une peine à la hauteur de l'injure", a déclaré
l'un d'eux.
L'avocat de la défense, Me André Ferran, avait demandé "la
relaxe" pour Georges Frêche. "Dire que les propos de M. Frêche sont
une injure raciale, constitue un viol pur et simple de la vérité", a-t-il
dit.
"Je voulais dire minus ou minable"
Absent à l'audience, Georges Frêche avait été mis en examen pour "injure
envers un groupe de personnes en raison de son appartenance ethnique, raciale
ou religieuse". Il a tenté de s'expliquer dans une lettre lue par la
présidente du tribunal, Michèle Monteil.
Il a souligné dans ce courrier avoir été "copieusement qualifié de 'cocu'
et de 'connard'", lors de la cérémonie. "Le terme de sous-homme est
sorti sur la colère, je voulais dire minus ou minable", a-t-il expliqué.
Lors d'une cérémonie à Montpellier en hommage à un ancien porte-parole de la
communauté pied-noir, le 11 février, Georges Frêche avait interpellé des harkis
qui avaient participé ce même jour à une manifestation de l'UMP: "ils (les
gaullistes) ont massacré les vôtres en Algérie et vous allez leur lécher les
bottes! Mais vous n'avez rien du tout, vous êtes des sous-hommes, vous n'avez
aucun honneur!", avait-il lancé.
"Un véritable taliban de la république"
Jeudi, à l'ouverture du procès, une centaine de personnes ont manifesté devant
les grilles du palais de justice de Montepellier. Une banderole était accrochée
sur laquelle on pouvait lire: "Tous unis pour condamner les insultes de
Georges Frêche sur les harkis".
Une dizaine d'associations, dont des associations de défense des harkis et la Ligue des droits de l'homme
(LDH), le MRAP et SOS-racisme, se sont constitués partie civile dans cette
affaire.
Les avocats des associations ont condamné des "propos aveuglants et
intolérables qui s'adressaient à l'ensemble de la communauté harkie":
certains ont souligné le "désir de faire mal" de la part d'un homme
politique, devenu "un véritable taliban de la république" qui a été
"transformé par l'ivresse du pouvoir" mais qui "sera jugé par
l'histoire".
Du côté de la défense de George Frêche, l'avocat a produit le témoignage de
Roland Dessy, retraité, qui a souligné que le prévenu avait "tout le temps
soutenu avec force, conviction et amour, la communauté des rapatriés. Lorsqu'il
a prononcé le mot de sous-hommes, personne n'a fait de relation avec les
(mêmes) mots employés 55 ans auparavant", sous le nazisme.
© Le Nouvel Observateur
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