SOS-Racisme, dans un
rapport qu'il remettra lundi 21 mars au président de la Halde Louis Schweitzer,
critique le faible nombre de poursuites judiciaires dans les cas de
discrimination à l'embauche et estime "ridicules" les peines d'amende
prononcées.
"Il y a un gaspillage d'efforts pour mobiliser les victimes, les témoins,
on leur dit 'signalez si vous êtes victime, vous serez aidés', et dans la
plupart des cas, il n'y a pas de suite", affirme dimanche Samuel Thomas,
vice-président de SOS-Racisme.
Initiateur de la méthode du "testing" pour prouver les cas de
discrimination, ayant à son actif de nombreuses affaires portées devant les
tribunaux, SOS-Racisme demande à la Haute autorité de lutte contre les
discriminations et pour l'égalité (Halde) de privilégier la poursuite
judiciaire, plutôt que la médiation, dans les affaires de discrimination.
"L'engagement de poursuites judiciaires et la tenue de procès publics a
une vertu pédagogique très importante", affirme le rapport. Les poursuites
permettent de mieux comprendre le mécanisme des discriminations, encouragent
les témoins, redonnent fierté aux victimes, et permettent, par leur publicité,
une prise de conscience générale.
30 procès/14.000 signalements
Une trentaine de procès, tous types de discrimination confondus, ont lieu
chaque année, selon SOS-Racisme, alors que 14.000 fiches de signalement avaient
été reçues lors de l'installation du numéro national d'appel (le
"114"), aujourd'hui supprimé.
Les seuls dossiers qui aboutissent, affirme Samuel Thomas, sont ceux qui sont
suivis par les associations. "Les procédures sont longues, on se heurte à
beaucoup de résistances, à l'inaction de la justice, de l'inspection du
travail. Comment une victime pourrait-elle agir seule, surtout si elle n'a
aucun gain personnel à tirer du procès", interroge-t-il.
Dans les cas de discrimination à l'emploi, la victime a peu de chances d'obtenir
réparation financière ou celle-ci reste très faible, souligne le rapport, et
donc "peu dissuasive".
Les sommes accordées à la victime, dans les affaires suivies par l'association,
sont allées de 150 euros à 4.500 euros (refus d'embaucher des personnes de
couleur pour travailler en salle, au restaurant du Moulin Rouge, en octobre
2003).
Durcissement
"Les peines d'amendes ou indemnités demeurent ridicules au regard de la
gravité du délit commis, des peines prévues par le code pénal et de ce qui se
pratique au Royaume-Uni, au Canada ou aux Etats-Unis", souligne le
rapport.
Au pénal, peu de juges condamnent à une peine de prison, mais l'association se
félicite d'une tendance au durcissement des peines requises par les procureurs.
SOS-Racisme souhaite une campagne d'information en direction des candidats à
l'emploi victimes de discrimination, et une meilleure formation des inspecteurs
du travail. L'association demande aussi que soit créé dans chaque département
des brigades d'officiers de police judiciaire spécialisés à la lutte contre les
discriminations, à l'instar de ce qui existe à Paris.
© Le Nouvel Observateur 1999/2000
Publier un nouveau commentaire