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Vous êtes toujours noir ?

Mardi, 22 Février, 2005
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Procès, cet après-midi, à Paris, contre une agence immobilière pour cause de discrimination raciale envers un père de famille ivoirien.

Vous êtes toujours noir ?

Procès, cet après-midi, à Paris, contre une agence immobilière pour cause de discrimination raciale envers un père de famille ivoirien.

Beugé Florentin Kouane est ivoirien. Il est chauffeur de taxi, avec une autorisation de séjour de dix ans qui n’a aucune chance de ne pas être renouvelée. En 2001, il cherchait un logement plus grand que celui qui abritait sa femme et ses enfants, deux étaient scolarisés dans une école primaire du 15e arrondissement de Paris et la plus petite dans une crèche du même arrondissement. Passant devant une agence, l’Étude Cheuvry, rue de Vaugirard, près de chez lui, dans le 15e, il remarquait un appartement à louer dans le quartier pour 900 euros, charges comprises, et entrait.

Aujourd’hui, sa famille et lui habitent à Évry. Ses enfants ont dû abandonner leurs copains et changer d’école et lui se résoudre à faire des kilomètres pour rentrer chez lui après son travail très parisien et très usant. Mais il n’a pas gardé son humiliation dans sa poche. Pourquoi cette délocalisation ? Parce que l’agence n’a même pas pris soin de lui faire remplir de dossier. Pas parce qu’il est chauffeur de taxi, avec une carte de séjour, ivoirien. Non. Parce qu’il est « noir » : « Le propriétaire ne veut pas louer aux gens de couleur, il loue à qui il veut, de toute façon, c’est comme ça, il a d’autres appartements dans le même immeuble et il ne louera pas à des gens de couleur », expliquait l’agent commercial de l’agence. Les témoignages des trois personnes de l’agence concordent : « Il arrive fréquemment que des propriétaires ne veuillent pas louer leur appartement à des personnes de couleur, explique le fils du gérant. Lorsque je travaillais à l’agence, si des personnes de couleur se présentaient pour louer un appartement dont le propriétaire était dans ce cas, je leur répondais que ce n’était pas possible ; et si les personnes insistaient, je leur disais carrément la vérité. Ce n’est pas du racisme. C’est la vérité, c’est comme cela. »

Résultat, cet après-midi, les responsables de l’agence passent devant le tribunal de grande instance de Paris.

Ils risquent 45 000 euros d’amende et trois ans de prison. Mais ils seront les seuls. La propriétaire des logements qui, selon les responsables de l’agence, n’aurait jamais donné de consignes discriminatoires, n’a pas été convoquée par le magistrat instructeur. Il est impossible de l’entendre, déplore Samuel Thomas, de SOS Racisme, partie civile, parce que le magistrat ne l’a pas voulu, contrairement aux souhaits de l’association. En effet, si l’agence est manifestement coupable, il est inconcevable qu’elle accepte de jouer les esclaves de propriétaires qui, « lorsqu’ils ne veulent pas louer à des personnes de couleur ne le disent jamais car ils savent que cela peut leur valoir des ennuis ».

Émilie Rive

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