
Sélection ethnique au Cap d'Agde ?
Le "testing" que vient
d'effectuer SOS Racisme au Cap d'Agde, qui a abouti au dépôt de plusieurs
plaintes, mardi, pour discrimination raciale à l'encontre de plusieurs hôtels
et d'une agence de location de vacances, n'a pas été fait au hasard. Les
établissements piégés, qui affichaient complet pour un membre de
l'association se faisant appeler Amar avant de d'assurer, peu après, qu'ils
avaient encore des disponibilités, aux mêmes dates, pour un autre membre de
l'association se faisant appeler Jean-Philippe, avaient été choisis parce
qu'ils figurent dans une liste réputée avoir été récupérée au sein même de
l'office de tourisme du Cap d'Agde. Cette liste, constituée de documents et
de tableaux dont l'association a adressé copie au procureur de la République
de Béziers, classe les hôtels et les agences selon qu'ils acceptent ou pas
les touristes au « nom de famille à consonance maghrébine ». Les
mentions "oui" ou "non" sont portées sur une des colonnes
du tableau, au même titre que les mentions d'usage décrivant les logements :
sèche linge, accès handicapés, forfaits week-end, location à la semaine, etc.
Selon SOS Racisme, le personnel de l'office de tourisme chargé de
réceptionner les appels téléphoniques des vacanciers ou de les accueillir au
comptoir ont pour consigne de ne pas renvoyer les personnes dont le nom de
famille est à consonance maghrébine aux établissements ayant fait savoir
qu'elles y seraient indésirables.Si l'existence de ce document est
authentifiée, ce dont ne doute guère SOS Racisme, ce serait une première en
France car la discrimination ne serait plus du simple fait d'un établissement
privé : elle serait répercutée, organisée et banalisée à l'échelon d'une
structure parapublique, en l'occurrence l'office de tourisme de la première
destination touristique du Languedoc-Roussillon.Dans cette affaire, explique
Samuel Thomas, vice-président national de SOS Racisme, « la justice fera
le distinguo entre les donneurs d'ordre et les exécutants. On est dans un
système de discrimination et il faut que les gens sachent qu'ils sont
passibles de poursuites devant les tribunaux s'ils ne dénoncent pas les
pratiques illégales qu'on leur impose, car ils s'en rendraient complices.
Pour l'instant, on ne sait pas qui est le donneur d'ordre. Le propriétaire,
qui demande à l'agence de ne pas louer à tel ou tel type de personne,
l'agence, qui demande à l'office de tourisme de ne pas lui adresser tel ou
tel type de vacancier, la municipalité, les commerçants ? La difficulté va
consister à remonter à la source de la discrimination et à établir la chaîne
des responsabilités ».Pour SOS Racisme, l'action qui vient d'être engagée
n'est pas dirigée contre le Cap d'Agde ou contre son maire et il est certain,
en ce qui concerne le résultat des "testings" opérés dans la
station, qu'ils auraient été les mêmes dans de nombreux autres lieux de
vacances. « Si nous rendons publics ces délits de discrimination, c'est
parce qu'ils se déroulent en ce moment même, au cœur de la saison
touristique, et parce que nous avons l'espoir que les faits dénoncés au Cap
d'Agde vont faire réfléchir l'ensemble des professionnels du tourisme de la
côte. Il faut savoir que le gouvernement actuel a renforcé les peines
encourues pour des faits de discrimination, qui passent de deux à trois ans
d'emprisonnement et de 200 à 300 000 F d'amende ». Philippe BERJAUDFaire
réfléchir les acteurs du tourisme
Photographe :
Philippe BERJAUD
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