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Menace discriminatoire pour un chèque de 24,67 euros dans un hypermarché

Mercredi, 25 Décembre, 2002
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Une lettre adressée à un particulier par une société de recouvrement comporte un paragraphe clairement menaçant.

Menace discriminatoire pour un chèque de 24,67  euros dans un hypermarché

Une lettre adressée à un particulier par une société de recouvrement comporte un paragraphe clairement menaçant.

 

"Déplacé". C'est en forme de litote que Didier B. dépeint le courrier qui lui est parvenu à la mi-octobre. A la suite d'un litige avec sa banque, son chèque de 24,67 euros à l'ordre d'un magasin Carrefour de Marseille, n'a pas été honoré. Une mésaventure qui lui a valu cette missive comminatoire de la société France Express recouvrement, saisie par la chaîne d'hypermarchés.

Empreinte de menaces de blocage de compte bancaire et d'"enquête auprès des Assedic et de la CAF", la lettre-type comporte un paragraphe clairement discriminatoire. Elle précise en effet qu'à défaut de prise de contact par le contrevenant à la réception du courrier, la société serait contrainte de "déposer plainte auprès des services de police", dans le cas où il est "titulaire d'une carte d'identité". Mais précise immédiatement : "Si vous êtes bénéficiaire d'une carte de séjour, nous transmettons au ministère de l'intérieur à Paris votre dossier". 

Bluff ou avertissement réel ? En faisant une différence de traitement entre les nationaux et les étrangers, cette menace de dénonciation spécifique pourrait tomber sous le coup du chef de discrimination raciale sanctionnée par le code pénal. Le propos a suffisamment choqué Didier B. pour qu'il saisisse SOS-Racisme.

"DE SOMBRES HEURES"

L'association ne s'est pas fait prier. Son vice-président, Samuel Thomas, a saisi, le 5 décembre, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), s'inquiétant de la communication d'informations nominatives au ministère de l'intérieur sur une base de nationalité. La commission a immédiatement adressé un courrier à France Express recouvrement et une copie à Carrefour France, les interrogeant sur les faits reprochés.

Le 17 décembre, SOS-Racisme prévenait le ministère de l'intérieur, s'interrogeant sur "une pratique qui nous renvoie à de sombres heures de l'histoire de notre pays". Elle saisissait également le PDG de Carrefour, Daniel Bernard, le questionnant sur d'éventuelles "consignes à son mandant". A la direction du groupe, on s'avoue "très surpris" : la société France Express recouvrement a signé, comme tous les autres prestataires, un contrat dans lequel elle s'engage à "n'utiliser aucun moyen de nature à porter atteinte à la vie privée du débiteur ni à nuire à sa profession", explique-t-elle. Le distributeur fait souvent appel à cette société "référencée depuis 1999" qui travaille pour ses hypermarchés de Lyon et de Marseille. "C'est la première fois que nous avons à gérer ce type de problèmes au niveau des recouvrements, alors que nous avons 50 000 chèques impayés par an. Mais à l'évidence France Express recouvrement n'a pas respecté les clauses du contrat et a nui à l'image de Carrefour", avoue Béatrice Weber, du service des relations extérieures.

La direction des hypermarchés a donc convoqué, mardi 24 décembre, les responsables de la société. " Nous nous réservons le droit de prendre les mesures nécessaires qui peuvent aller jusqu'au dépôt de plainte", précise Mme Weber. Une lettre d'excuses a par ailleurs été envoyée à Didier B. SOS-Racisme étudie de son côté la saisine de la justice, et envisage une campagne de boycottage si de telles pratiques d'" intimidation" perduraient.

Sylvia Zappi

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