

Fichage ethnique
Euro Disney dans le collimateur de SOS Racisme
Aurélien Perol | 05.11.2009, 07h00
La nouvelle a fait l’effet d’une bombe à l’ombre du château de Cendrillon. A la demande de l’association SOS Racisme, un huissier de justice s’est rendu hier matin au siège d’Euro Disney, qui emploie 13 000 salariés à Disneyland Paris, en Seine-et-Marne. L’homme de loi devait y saisir les listings de salariés et de candidats à l’embauche qui, selon l’association antiraciste, établissent illégalement un classement « ethno-racial » du personnel.
Début octobre, le président du tribunal de grande instance (TGI) de Meaux a
donné raison à l’association. Estimant qu’il existe de « fortes présomptions »
de fichage ethnique des candidats à l’embauche ou des salariés « en vue de
pratiquer une politique discriminatoire entre les individus fondée sur un
critère d’origine ». Le TGI a ordonné à l’huissier de se faire remettre trois
fichiers informatiques. A commencer par un listing de personnes ayant répondu à
des offres d’emplois sur le site Internet d’Euro Disney. Les candidats devaient
y préciser s’ils venaient des DOM-TOM. Un document que la direction de Disney a
refusé de remettre à l’envoyé du juge.
« Cela n’a pour but que de permettre aux candidats d’être remboursés de
leurs frais de transport »
En revanche ce dernier a pu se procurer un fichier personnel des salariés mentionnant
d’étranges nationalités « Guadeloupe,
Guyane française, Martinique, Réunion ». Egalement saisi par la justice : un
listing informatique de salariés classés par catégorie « Afrique hors Maghreb
», « Afrique Maghreb », ou encore « Europe de l’Est ». Selon le vice-président
de SOS Racisme, Samuel Thomas, ces fichiers « permettent déjà de classer chaque
individu par catégorie ethno-raciale ».
Dans un rapport* accablant remis hier à Patrick Karam, le délégué
interministériel à l’égalité des chances des Français d’outre-mer (lire nos
éditions de mercredi) , SOS Racisme dénonce la « politique de
discrimination » d’Euro Disney visant à favoriser l’embauche d’employés «
majoritairement européens », car « l’essentiel de la clientèle est européen ».
La direction d’Euro Disney s’est insurgée, hier, contre ces accusations : « La
mention de la région ou du pays de résidence sur notre site Internet n’a pour
but que de permettre aux candidats d’obtenir le remboursement de leurs frais de
transport », affirme un porte-parole.
Et de dénoncer « l’opération médiatique déplorable » de SOS Racisme : « Nous
employons 24 % de salariés étrangers, dont 34 % de non-Européens. Vu nos
engagements pour la diversité, il y a de quoi prendre ces accusations à coeur.
» Pas de quoi faire reculer SOS Racisme : rappelant avoir déjà déposé plusieurs
plaintes pour discrimination contre Disneyland, « qui sont aujourd’hui au point
mort », Samuel Thomas compte saisir le parquet de Meaux afin d’obtenir les
fichiers que l’huissier n’a pas pu consulter.
* Mise en cause par SOS Racisme, la Commission nationale de l’informatique et
des libertés (Cnil) a exprimé « son étonnement » face aux accusations «
infondées » de ne pas collaborer à la lutte contre le fichage ethnique. La Cnil
revendique une action « exemplaire » dans ce domaine et rappelle qu’elle
dispose d’un pouvoir de sanction dont elle « n’a jamais hésité à en faire
usage, notamment dans le cadre des plaintes transmises par SOS Racisme ».
Tous les articles de la rubrique
Le Parisien
Publier un nouveau commentaire