
"Discrimination raciale lors d'une vente de terrain: prison
avec sursis et amende
14 septembre 2004
GRENOBLE (AFP) - Une propriétaire d'un terrain à bâtir, qui avait refusé de
vendre à un couple, au motif que le mari était d'origine maghrébine, a été condamnée
mardi à quatre mois de prison avec sursis et à des amendes et dommages et
intérêts.
La propriétaire devra également signer le compromis de vente.
Mme Sylvianne Sarret, qui réside dans les Alpes Maritimes, a décidé de faire
appel de ce jugement, a précisé son avocat, Me Pierre-François Crozé.
Le tribunal correctionnel de Grenoble l'a en outre condamnée à verser 10.000
euros au couple acheteur, en compensation de son préjudice financier, et 1.500
euros de dommages et intérêts au mari, Hamida Brahmia (bien Brahmia), et 500
euros à son épouse, Audrey.
Le tribunal a de plus ordonné la publication, aux frais de Mme Sarret, de la
condamnation dans le journal professionnel de la FNAIM (Fédération nationale
des agences immobilières). Les associations MRAP (Mouvement contre le racisme
et pour l'amitié entre les peuples) et SOS Racisme, parties civiles, ont obtenu
chacune 1.050 euros de dommages et intérêts.
Le procureur de la
République avait requis une amende de 2.500 euros à
l'encontre de la propriétaire et de son époux, lors de l'audience du 31 août.
Seule l'épouse a été condamnée, étant la propriétaire en titre du terrain.
Hamida et Audrey Brahmia, tous deux de nationalité française, avaient signé un
compromis de vente en juillet 2003 dans une agence immobilière mandatée par la
propriétaire, pour un terrain de 1.350 M2 vendu 13.000 euros. Mais, malgré un
jugement au civil en mars 2004 ordonnant la vente, la propriétaire, Sylviane
Sarret refuse de signer.
A la barre, l'agent immobilier avait déclaré lors de l'audience: "Mme
Sarret, qui venait signer le compromis en compagnie de son mari, a changé
d'avis lorsqu'elle a entendu le prénom de M. Brahmia. +Mais c'est un arabe+,
s'est écrié Mme Sarret". "Elle a demandé un certificat de mariage et
des photos pour savoir s'ils étaient de bonne famille", avait ajouté
l'agent.
Devant le tribunal, Mme Sarret et son mari avaient vivement contesté avoir des
préjugés racistes et avaient évoqué des erreurs dans la rédaction du compromis
de vente.
"C'est un jugement exemplaire, qui fera jurisprudence", a déclaré
l'avocat des plaignants, Me Benoît Pin. "C'est un message extrêmement fort
qui a été envoyé. Que nous soyons d'origine française ou arabe, nous avons les
mêmes droits", a déclaré à la presse Hamida Brahmia, visiblement très ému.
"La justice a pris la mesure de la souffrance que j'ai enduré quand j'ai
essayé d'acheter ce terrain", a affirmé ce cadre commercial en expliquant
qu'il avait tenté, jusqu'au dernier moment, d'éviter ce procès.
Le vice-président de SOS racisme, Samuel Thomas, a déclaré: "une peine de
prison, même si elle est avec sursis, cela concerne des malfaiteurs. Il est
très important que la condamnation soit publiée dans le journal de la FNAIM. Ce sont eux qui
feront passer le message. La discrimination pour une vente est
inadmissible".
Selon Me Benoît Pin, M Brahmia, d'origine algérienne, a déposé un permis de
construire qui devrait bientôt être validé par la mairie. "Lorsque le
permis sera délivré, Mme Sarret sera sommée de signer la vente sous (la menace
d') une astreinte de 3.000 euros par mois", a indiqué l'avocat"
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